Augmentation significative des avalanches rocheuses : l’impact de la hausse des températures

Le nombre de catastrophes environnementales en milieux montagneux a fortement augmenté durant ces dernières années, notamment suite au dérèglement climatique émanant des activités humaines et de leurs pollutions. Les évènements récents ainsi que la gravité de leurs impacts sur les territoires (destruction de vallées entières, infrastructures,etc) et sur les populations (blessés, morts) illustre le fait que les espaces montagneux ne sont pas épargnés par l’augmentation des températures moyennes, ou du dérèglement des saisons.

Il est désormais reconnu que les zones avec une altitude élevée connaissent une augmentation plus rapide des températures, soit l’elevation-dependent warming (EDW, « réchauffement dépendant de l’altitude »). Nous savons aujourd’hui que depuis 1950 le réchauffement observé dans ces zones de haute altitude est de 25 % à 50 % plus rapide que sur le reste de la planète. 

Les effondrements du glacier de la Marmolada (3 juillet 2022, Italie) et d’un pan rocheux dans la vallée de la Maurienne ( 27 aout 2023, Savoie, Alpes) représentent l’ampleur de ces catastrophes qui entraîne la chute de plusieurs milliers de mètres cubes de roche et de glace. Ces éboulements surviennent après une élévation de la température en altitude, notamment lors de l’effondrement mortelle d’une partie du glacier de la Marmolada, faisant 6 morts et 8 blessés dans le massif des Dolomites (Alpes italiennes) avec une température mesurée la veille de plus de 10°C, précoce à cette période de l’année. 

Ces évènements nouveaux deviennent de plus en plus récurrent dans ces zones fragiles , notamment suite aux impacts directs qu’ont l’augmentation des températures sur la composition des sols rocheux.

Pourquoi une telle fragilisation des roches ?

Les roches sédimentaires sont le type de roche les plus soumises au processus d’altération, soit le processus de fragmentation de la roche la transformant en sédiments (processus pouvant se dérouler en profondeur). Ce processus est différent de celui d’érosion, qui se déroule en surface et qui peut être défini comme l’usure et la transformation subie par la roche au contact de l’atmosphère. 

L’altération peut être illustrée comme la création de multiples fissures dans de la roche, jusqu’à ce qu’un bloc de roche entier se détache de la montagne et se transforme en amas de cailloux après l’avalanche rocheuse. 

Ainsi l’altération mécanique donne lieu à une augmentation des fentes dans les roches (morcellement de la roche), notamment par le biais de 4 agents : 

  • l’altération par la glace (cryoclastie)
  • l’altération par la température (thermoclastie) 
  • l’altération par précipitation du sel 
  • l’altération par des racines 

La thermoclastie correspondant à l’alternance entre des températures élevées et (ou) basses (chaud/froid) est l’agent le plus actif dans l’altération mécanique qui touche l’effondrement des pans rocheux, car cela va avoir un grand impact sur les fentes dans les roches. En effet les fissures dans la roche vont pouvoir accueillir de l’eau, or quand l’eau va se transformer en glace (alternance hiver/été) le volume occupé par la glace va être beaucoup plus important et cela va effectuer une pression sur le roche, ce qui va d’avantages agrandir les fentes. (voir shéma)

Si une alternance a lieu entre des températures basses puis hautes et ainsi de suite, la glace présente dans les fissures va pouvoir fondre, et ces fissures vont pouvoir contenir encore plus d’eau suite à leur élargissement avec la pression faite par la glace. Ensuite cette eau va re-geler en prenant encore plus de place ce qui exacerbe la pression effectuée sur la roche. En résumé, plus l’eau se solidifie puis se liquéfie plusieurs fois d’affilées, plus les fentes vont s’élargir et plus la roche va ressembler à un gruyère. Ainsi des pans rocheux sont plus à même de se décrocher suite à l’augmentation de la taille et du nombre de fentes dans la roche, du fait de la fragilisation continue de la roche par la thermoclastie et sa pression soumise sur la roche.

Les impacts concrets du réchauffement des températures sur les milieux montagneux

Dans les zones de haute altitude notamment, on peut retrouver sur la roche une couche de pergélisol (aussi connu sous le nom de permafrost en anglais) qui est un sol en permanence gelé. Ce sol est composé de glace, de matière organique, d’eau et d’air. Il peut ainsi être retrouvé dans les zones arctiques et dans les zones montagneuses où il y a des glaciers, soit dans des zones où les températures sont relativement basses. La couche de pergélisol est majoritairement mise à l’abri sous une couverture neigeuse durant la plus grande partie de l’année voire l’année complète, ce qui permet de conserver des températures basses dans les sols qui préserve le pergélisol et la glace qui se trouve dans les fentes rocheuses. 

Or avec l’augmentation sans précédent des températures moyennes dans les zones de haute altitude, la couverture neigeuse tend à disparaître très rapidement, ce qui ne lui permet plus de protéger le glacier ainsi que le pergélisol en dessous. Ces deux éléments se retrouvent donc également exposés aux changements de températures, ce qui provoque de plus en plus une liquéfaction de la glace et du pergélisol. 

En reprenant les processus vu précédemment, cela permet de comprendre la façon dont les sols vont se fragiliser et provoquer des effondrements de parties de glacier ou de pans rocheux. Le mécanisme de la thermoclastie va pousser à un élargissement conséquent des fissures rocheuses suite à la fonte et re-fonte de l’eau qu’elles contiennent, or lorsque ces fissures sont devenues trop larges et que la glace fond, alors plus rien ne retient le bloc rocheux qui va se détacher et créer un éboulement potentiellement mortel. L’avalanche rocheuse dans la vallée de la Maurienne le 27 août

2023 en Savoie a eut ainsi lieu après l’observation sur plusieurs jours de températures supérieures à la normale et pouvant atteindre jusqu’aux 10 degrés Celsius.

En résumé...

Le dérèglement climatique expose les milieux montagneux à de nouveaux risques notamment celui accru des éboulements de pans rocheux et de glaciers suite à l’augmentation des températures. Si ces évènements ont de multiples conséquences sur la sécurité pour les populations et espèces animales et végétales évoluant dans ces milieux, cela va poser un plus large problème concernant les réserves d’eau que représentent les glaciers. Leur éboulement et leur fonte peut être considéré comme l’amorce de leur disparition dans les prochaines années, alors qu’ils représentent une réserve essentielle d’eau et d’énergie pour tous les territoires.

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